Histoires de vies simples à l’écran cette semaine avec deux films réalisés par des femmes.
La Vie domestique
Lassée du stress et de l’agitation de la capitale, Juliette s’est installée avec son mari, proviseur de lycée, et leurs deux enfants dans un pavillon cossu de la banlieue parisienne. En attendant de savoir si elle obtiendra le poste important qu’elle convoite dans une maison d’édition, elle enchaîne une nouvelle fois les tâches ingrates d’une femme au foyer.
En adaptant le roman « Arlington Park » de Rachel Cusk, Isabelle Czajka filme vingt-quatre heures de la vie de quatre femmes qui ne semblent avoir comme horizon que les quatre murs de leur maison et les balades dans le parc. D’un niveau social privilégié, elles s’ennuient même si elles n’osent l’avouer qu’à demi mot avec un sourire feint. Emmanuelle Devos est boulversante durant cette journée qui résume son quotidien dans un instantané cruel. Ses partenaires Julie Ferrier, complexée par ses origines sociales modestes, Natacha Rénier enceinte et fatiguée et Hélène Noguerra dépassée par sa progéniture ne sont pas moins épatantes, faussement battantes lorsqu’elles sont réunies et s’écroulant dès qu’elles retrouvent leur solitude. La pause café autour d’une machine à expresso certainement déposé par « Monsieur What else? » est un grand moment de comédie dans un film qui n’en manque d’ailleurs pas, même si l’on rit souvent jaune.
La réalisatrice fait un constat amer sur l’égalité des sexes, car même dans les couples heureux dépeints ici, l’homme reste insensible à ce que vit sa compagne et se repose sur elle, sans s’inquiéter de leurs souffrances. « La Vie domestique », au double sens terrible, remet un coup de projecteur sur cette terrible réalité : la difficulté de mener en parallèle une vie d’épouse et de mère et une carrière professionnelle. Le film ne se limite pas à son sujet social, car au long du récit plane la menace de la disparition d’une petite fille dans une atmosphère que ne renierait pas David Lynch.
La Tendresse
La réalisatrice belge Marion Hänsel présente son nouveau film au joli titre « La Tendresse ». C’est l’histoire simple d’un couple, séparé depuis un certain temps, qui se retrouve quand leur fils a un accident de ski. Ils doivent se rendre à son chevet et cette rencontre donnera lieu à des scènes où se partagent rancoeur, regret, amitié et surtout tendresse.
Ils n’ont semble-t-il pas changé: elle reste ouverte, plutôt « écolo », lui demeure plus bougon, conservateur. Toutefois, on sent bien que le fil n’est pas encore rompu entre eux. Mais l’histoire se terminera comme elle a commencé, chacun repartant de son côté, avec sans aucun doute, quelque chose de plus dans le coeur et le souvenir.
Le parti pris évident – et risqué – est de ne parler que des petites choses de la vie, de la normalité, voire de la banalité. Les détails de la vie quotidienne, les phrases toutes faites, sont restitués avec une mise en scène classique, soignée et lente bien que le film soit aussi un road-movie avec beaucoup de routes et de paysages, le couple devant traverser toute la France depuis le Belgique pour rejoindre les alpes savoyardes.
« La Tendresse » est le 11ème film de Marion Hänsel qui s’est fait connaître par deux adaptations à l’écran d’oeuvres romanesques célèbres : « Dust » du Prix Nobel sud-africain J.M. Coetzee et « les Noces barbares » d’après le Prix Goncourt Yann Queffelec.
La réalisatrice s’est attachée particulièrement au personnage féminin et l’on devine une part d’autobiographie dans ce film de fiction. C’est donc un regard porté sur les femmes de quarante ans dans notre société moderne. Mais la cinéaste privilégie l’aspect tranquille, presque harmonieux, des rapports humains, évitant le drame, le pathos, le conflit. c’est donc une histoire qu’elle raconte, comme cela peut arriver à tout le monde. L’interprétation d’Olivier Gourmet et Marilyne Canto est au diapason des intentions de la réalisatrice, toute en sobriété et subtilité.
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